samedi 4 février 2017

LE REEL INTERSUBJECTIF

Tout être de raison conviendra sans grande explication que le réel pris au sens d’existence des objets physiques peut être perçu de manière fort différente d’un individu à l’autre.
Bien entendu le réel en soi n’est pas mis en cause et chacun admettra que les variations sensorielles du sujet percevant ne sont pas toujours égales et dépendent de la qualité des sensations qui peuvent dans certaines circonstances être altérées par la fatigue, la maladie ou l'illusion d'optique (exemple : http://www.dailymotion.com/video/x2iui3m) mais en tout état de cause, nous postulons de manière irréfléchie (ou inconsciente) que le monde se doit d’être une expérience partagée dans une sorte consensus généralisé. En effet, si je vois réellement une voiture arrivée il ne se trouvera personne dans la rue (connu ou inconnu) pour prétendre qu'il s'agit d'un cheval. 
Mais qu’adviendrait-il si le grand consensus se lézardait et devenait totale discordance ; autrement dit comment vivrions nous un désaccord universel sur la perception des choses ?
Rassurez-vous  la question est purement théorique et n’est certainement pas un cas envisageable pratiquement.
Pourtant si vous voulez déstabiliser la conscience d’un homme ou d’une femme vous pourriez vous adonner à un petit jeu en apparence anodin.
Dans un premier temps convenez avec un maximum de vos amis qu’une chose n’est pas ce qu’elle est et, ensuite trouvez un « cobaye » à qui tous ensemble et contre toutes évidences vous prétendrez que ce qu’il perçoit n’est pas ce qu’il perçoit. 
Dans ce cas, Il faut avoir une force de caractère et une personnalité remarquable pour ne pas douter de la réalité des choses face à tant de gens assurant que le cobaye divague et ne voit pas ce qui est réellement. C’est en quelque sorte une question statistique : un très grand nombre d’avis unanimes, même faux, peuvent emporter l’adhésion d’un individu isolé qui ne fait pas le poids.
Plus le "cobaye" sera jeune, plus l'exercice sera réussi car évidemment il sera moins formaté par la culture avec son cortège de catégories conceptuelles, autrement dit il sera plus proche de la naïveté de l'enfance.
Les catégories conceptuelles sont imprimées dans notre cerveau lors du processus d'éducation, elles couvrent tout le champ de notre existence, ainsi quand on voit un arbre il n'est plus nécessaire de se poser chaque fois la question "qu'est-ce que c'est" car la catégorie arbre préexiste dans notre encéphale puisqu'on nous a appris à reconnaître les arbres sous toutes leurs formes.
Pour chaque individu, le monde est devenu ce que nous avons appris qu'il était et seuls de rares troubles de la perception peuvent perturber l'image universelle composée en nous.

Mais si le réel est une construction avons nous quand même un vrai lien avec lui ?

Bien entendu mais ce que nous percevons est systématiquement interprété au point que le monde n'est plus ce qu'il est mais ce que nous croyons qu'il est. Pire notre image du monde à l'état brut est également un produit de synthèse élaborée à partir d'influx nerveux car le monde est transcendant, c'est-à-dire au-delà de nos limites corporelles, étranger à nous-même.  En fait nous n’avons aucun moyen de savoir que le monde où nous vivons est bien ce qu’il paraît être sinon parce que « les autres me le confirment » explicitement ou implicitement à chaque instant. Et de là à prétendre que le monde en soi  ne nous est pas accessible il n’y a qu’un pas facilement franchissable.

Mais direz-vous cela est pure spéculation !

Pas si sûr même lorsque nous sommes tous d’accord.
Prenons l’exemple d’un arc-en-ciel, tout le monde est capable de percevoir l’objet « arc-en-ciel » mais personne n’est capable de le situer en un endroit précis car si l’on avance il avance avec nous et si l’on s’arrête il s’arrête avec nous, alors où est l’arc-en-ciel ?
A vrai dire nulle part et partout en même temps dans le champ de vision.
Qu’est-ce à dire, qu’une chose peut être existé sans être localisable ?

Pourtant la première condition d’existence des objets est leurs coordonnées spatio-temporelles sans quoi nous ne pouvons décrire qu’une expérience commune mais pas une existence qui s’impose à tous. Bien entendu, scientifiquement le phénomène s’explique mais l’objet n’en reste pas moins insaisissable car la réalité avant d’exister en soi est d’abord une expérience commune : un réel intersubjectif.   

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