vendredi 3 juillet 2015

TRANSFORMATION DU SUJET ET CONNAISSANCE

Le précédent article visait la signification de la « volte vers soi », or maintenant il faut voir comment cette pratique du sujet s'articule avec le dire-vrai et le savoir.

Chez les cyniques.

On considère que la connaissance de la nature chez les cyniques est désavouée mais le propos doit être nuancé notamment à l'égard de Diogène de Sinope qui fut un temps précepteur de jeunes enfants et enseignait bien les sciences.

En revanche à l'époque impériale romaine Demetrius cherche plutôt la connaissance utile. Il emploie le modèle de l'athlète qui doit juste maitriser et se concentrer sur la connaissance de quelques gestes.

De même le philosophe doit éviter tout ce qui est inutile c'est-à-dire notamment la connaissance du monde et se concentrer sur la connaissance utile à la vie humaine (domination des craintes y compris des hommes, des dieux et de la mort, indifférence au hasard, mépris des frivolités, etc.).

La connaissance inutile de la nature se caractérise par le principe de causalité et la recherche futile et spéculative des causes à l'origine des phénomènes. Quand elles ne nous distraient plus de l'essentiel, elles ne sont pas interdites en supplément ornemental à une âme déjà retirée à l'abri.

Demetrius oppose la connaissance des causes à une connaissance de préceptes relationnels prescriptifs et principiels qui transforme le sujet. Il ne cherche pas à définir les secrets de l'âme ou de la nature humaine comme ce sera le cas plus tard notamment chez les chrétiens.

Ces connaissances prescriptives modifient la manière d'être (êthos) et ont pour effets de calmer l'âme et de la rendre bienheureuse en ayant produit de l'êthos.

Donc l'opposition connaissance de la nature connaissance du sujet n'est pas pertinente il s'agit plutôt de la distinction entre connaissance causale et connaissance relationnelle.

Chez les épicuriens.

La connaissance qui produit de l'êthos (manière d'être), c'est la phusiologia (connaissance de la nature) mais pas le savoir culturel (padeia). Les artistes du verbe, les faiseurs de mots appréciés des foules ne font pas usage du logos mais de la parole qui fait seulement du bruit.

La physique prépare (paraskeuê), et cette préparation c'est ce qui permet d'être stable, autonome, satisfait, ce qui permet aussi de faire le partage - comme chez les stoïciens - entre ce qui dépend de soi et ce qui dépend du monde mais encore de donner à l'âme ses armes pour la victoire : l'intrépidité, la hardiesse contre les sollicitations du monde, contre les croyances et l'autorité qu'on lui impose.


La phusilogia est la connaissance en tant que principe de conduite capable de transformer le sujet, de lui donner de la sérénité et de la liberté de parole (parrehêsia), c'est-à-dire un discours proche de la prophétie qui est vrai et qui prescrit au contraire de l'opinion. La connaissance n'a d'autre fin que l'ataraxie.

Comme chez les cyniques, il n'y a pas de frontière entre savoir de la nature et savoir du sujet. Ce n'est pas un déchiffrement de la conscience par elle-même, ni une auto-exégèse 

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